Mais ce nouveau venu vient bouleverser les idées reçues à propos du monde des virus. Baptisé "Virophage", par analogie avec les bactériophages qui sont les virus de bactéries, celui-ci a été découvert en effet dans un virus géant appelé Mamavirus. L'équipe de l'Unité de recherche sur les Maladies Infectieuses et Tropicales Emergentes (CNRS/Université Aix Marseille 2), dirigée par Didier Raoult, a montré que ce nouveau venu est également capable d'infecter le virus géant Mimivirus. Rappelons que ce dernier, découvert en 2003 par cette même équipe, est le plus grand virus à ADN jamais recensé. Or jusqu'à présent, il est admis que chaque domaine du vivant, au nombre de trois (eucaryotes, bactéries, archées), est parasité par des virus qui leur sont propres.
Après avoir pensé que le virophage était comparable aux fragments d'acides nucléiques appelés satellites que l'on trouve régulièrement associés aux virus, d'où le nom de "Spoutnick qui lui a été donné, Didier Raoult et son équipe ont finalement montré qu'il s'agissait finalement d'un véritable virus. Incapable de se multiplier seul dans les cellules, le virophage doit en effet se multiplier dans l'usine à virus de Mimivirus où il est produit parallèlement à son hôte. Alors parasite de ce dernier, il entraîne une diminution de la multiplication de Mimivirus, ainsi que des défauts de fabrication qui se caractérisent par des anomalies morphologiques.
Le virophage échange des gènes avec Mimivirus, mais il importe aussi des gènes de virus d'autres domaines de la vie. L'analyse de son génome, réalisé en collaboration avec des chercheurs français et américains, l'a montré. Ainsi les chercheurs ont découvert chez Spoutnick une composition génique très particulière, avec des gènes de Mimivirus, un gène de virus d'archée et deux gènes proches de ceux des bactériophages. Constituant une nouvelle famille virale et une nouvelle entité biologique, le virophage est donc un virus de virus qui permet de réaliser le transfert latéral de gènes entre virus géants. Une découverte qui renforce l'idée que les virus géants, tout comme les autres organismes, ont des parasites viraux qui sont susceptibles de permettre le transfert de gènes d'un virus à un autre.
Les résultats de ces travaux viennent d'être publiés dans la revue Nature, le 7 août dernier.
Pour en savoir plus, contact : Unité de recherche sur les Maladies Infectieuses et Tropicales Emergentes (CNRS/Université Aix Marseille 2) - Didier Raoult - email : didier.raoult@medecine.univ-mrs.fr
Source : BE France numéro 214 (14/08/2008)